La poésie de la vie
Sabine Dultz - Münchener Merkur (30 juillet 2008)

La Maison des cerfs à la Perner-Insel : la troupe belge Needcompany joue avec succès la pièce commandée pour le Festival de Salzbourg. Par Sabine Dultz « Personne n’écrit sa propre histoire, » dit Viviane au cours de la pièce. Elle est non seulement la mère et grand-mère de la famille dont il est question dans cette histoire. Elle est également la magistrale comédienne Viviane De Muynck, le chef du clan, le centre nerveux de cette famille théâtrale, qui traverse pays après pays pour jouer. A présent, ils se retrouvent à Salzbourg. A la Perner-Insel à Hallein, le Belge Jan Lauwers et sa Needcompany, une troupe de comédiens, de danseurs, de musiciens et d’écrivains de diverses nationalités, ont joué pour la première fois leur nouvelle pièce « La Maison des cerfs », l’œuvre commandée pour le Festival de Salzbourg. Cette pièce est la dernière partie de la trilogie « Sad Face / Happy Face – trois histoires sur la condition humaine », qui pourra également être vue dans son intégralité à partir de vendredi. Pourtant, « La Maison des cerfs » est une histoire entièrement autonome. Le hall, attrayant, offre un espace théâtral large, bien éclairé, symbolique. Des cerfs blancs et des bois, des têtes de cerfs et autres parties d’animaux ont été joliment drapés sur la scène, volant de haut en bas, participant à l’action. Il y a aussi des étagères roulantes couvertes de serviettes blanches et de toutes sortes d’objets, notamment de petites oreilles d’animaux, dont chaque comédien s’affuble au fur et à mesure. Une garde-robe remplie de vêtements à la fourrure très abondante, dont les acteurs et les danseurs se pareront. Une aile. Trois plateformes mobiles, qui font office à la fois de table, de lit et de scène. Mais tout cela représente au départ un vestiaire de théâtre. Les artistes se saluent, se racontent des histoires comiques ou tragiques sur leurs voyages. Tijen, la danseuse, revient tout juste du Kosovo. Elle y cherchait des renseignements sur son frère, qui est mort là-bas en tant que photographe de guerre. Elle a apporté un petit cahier, avec des notes du défunt, dont la toute dernière phrase révèle qu’il doit trouver la maison des cerfs. C’est là que commence la fiction, en même temps que le deuxième acte : l’histoire d’une famille au Kosovo, qui vit loin de tout et subvient à ses besoins en élevant des cerfs, une famille chez laquelle la grande guerre s’introduit par effraction dans la vie quotidienne, avec son cortège de catastrophes humaines – le désastre se manifeste sous la forme d’Inge, la fille exécutée, et de son assassin Benoît, un photographe de guerre occidental. Au cœur des violences de la guerre, on l’a obligé à faire un choix : soit on tuait deux personnes – la mère et la fille – soit il sauvait l’enfant en devenant lui-même l’assassin et en abattant la mère. Il ramène son cadavre à la maison. Viviane l’accueille. Mais voilà la question : qui va punir l’assassin, et qui punira l’assassin de l’assassin ? Personne ne peut échapper à la vie, personne, de toute cette famille, n’est épargné par la culpabilité. Le chagrin causé par la mort des gens dépasse tout. Mais il y a aussi la célébration de la vie, la célébration du lien familial. Une famille qui, à cet instant de la pièce, redevient une simple famille de théâtre. Viviane, mère et grand-mère, subit l’histoire que personne n’écrit soi-même, avec mélancolie et force. Et avec son amour infiniment puissant, débordant de pardon, pour la défunte Inge, dont elle tente d’habiller et de rendre présentable le cadavre raidi, et pour Grace, sa fille mentalement retardée, qui à la fin sauve les cerfs des chutes de glace grâce à sa prévoyance. C’est le réveillon de Noël, un grand dîner est prévu. Ce sera donc également un repas de funérailles, un rite en l’honneur des morts. On danse et on chante sur la scène déblayée, avant que la prochaine catastrophe, la suite de l’histoire, ne les frappe de plein fouet. Tout cela est présenté avec une clarté impressionnante et avec une puissance poétique suprême, pleine de tristesse, qui ne dérape jamais pour autant dans le sentimentalisme, et pleine d’éléments comiques suscités par l’action elle-même et par l’optimisme avec lequel les personnages anticipent un avenir possible. Une soirée théâtrale au bilan lourd, tant en morts qu’en survivants, mais concluante d’un point de vue artistique. Touchante, émouvante, et aussi joyeuse, tout simplement. Une histoire dans laquelle réalité et fiction se chevauchent constamment. Une esthétique théâtrale ludique et féerique, tout en étant très moderne. Le fait que chaque artiste, qu’il soit acteur ou danseur, parle ici se propre langue, semble tout simplement logique. Grâce aux surtitres en allemand, tout devient très compréhensible. Une première merveilleusement réussie.

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