'The Porcelain Project' de Needcompany : du non-sens au carré
Danielle de Regt - De Standaard (12 octobre 2007)

BRUXELLES – Dans ‘The Porcelain Project’, Grace Ellen Barkey porte sur la scène tout un tas d’absurdités pertinentes. Et le plus beau, c’est que ça marche. Il faut rendre à César ce qui est à César : ce don, Grace Ellen Barkey l’a toujours possédé. Et elle sait comment s’en servir pour en tirer des spectacles haut en couleurs, qui frappent surtout par leur splendeur visuelle et leur puissance imaginaire. Ainsi, sa production précédente, Chunking, titillait les sens dans le meilleur des cas. Mais en même temps, la limite entre l’érotisme grotesque et l’anecdotisme vulgaire était aussi mince que le papier peint à fleurs qui décorait la scène. The Porcelain Project, par contre, danse con brio sur la corde raide entre forme et fond. Ici, le non-sens multiplié par le non-sens donne un résultat très parlant. Des centaines de pièces de vaisselle se balancent au bout de ficelles. L’espace scénique est délimité par des vases biscornus. Une vague ambiance de décadence imprègne l’air. C’est l’environnement parfait pour un drame royal déjanté dégoulinant de frivolité. A un rythme d’enfer, on saute à cloche-pied d’une mascarade bariolée à l’autre. Ces mascarades sont accompagnées de violons pompeux et de rondes et duos du même acabit. Les glorieux ballets romantiques d’antan pâlissent à côté de cette mise en scène. La boîte à images féerique qu’ouvre Barkey devant nos yeux hurle au kitsch excessif tout en nous chuchotant à l’oreille une sombre allégorie sur le pouvoir, la volupté et le désir. Même après une bonne dose de pilules qui font rire, Shakespeare n’aurait pas pu en imaginer autant. La cour, habillée en jupes à cerceaux ou en culottes bouffantes, se meut de façon lyrique et poétique. Même si tout cela semble initialement plein de grâce et de naturel, la puissance manipulative de la porcelaine qui entoure les personnages est immense. La scénographie dirige la chorégraphie et les petits bonshommes qui l’exécutent. Toute cette légèreté et cette transparence n’est qu’apparence pour la galerie. Une apparence qui s’effrite lentement et qui émousse les mouvements de danse. Le roi qui se promène au milieu de ce mic-mac subit le même processus de déchéance. Dans ses discours, la folie des grandeurs se transforme en démence insensée. Ce qui rend The Porcelain Project aussi sublime, c’est l’intégration et la maîtrise totale de tous les éléments qui sont nécessaires pour faire fonctionner un tel spectacle. La musique, l’image scénique et les performers se confondent de façon organique pour aboutir à une expérience totale débordante d’énergie, qui vous touche jusqu’au cœur des fibres. De plus, The Porcelain Project est un exercice difficile visant à toucher la corde sensible qui est enfouie quelque part entre d’autres choses plus évidentes : l’humour grivois, la sexualité exsangue et l’ironie trop évidente. Pourtant, Barkey parvient à trouver le juste degré de sensibilité sans entamer la délicieuse impression qu’elle en fait beaucoup trop. Un conte déjanté qui vous entraîne sans peine vers un excès noir de jais : rarement tout cela a paru aussi crédible.

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