A l’approche de la mort, Gustav Mahler composa ‘Der Abschied’, l’une de ses œuvres les plus poignantes. Grace Ellen Barkey et Lot Lemm, membres de  Needcompany, s’emparent de ce thème dans le spectacle ‘FOREVER’, dont la première a eu lieu au ‘steirischer herbst’. Pour ce faire, elles ont remplacé les instruments par de la porcelaine carillonnante et des corps trépidants aux cœurs battants.

‘Das Lied von der Erde’ est le titre d’une symphonie de lieder de Mahler, dont l’Abschied constitue le final. Est-ce le chant de quelqu’un qui n’arrive pas à dire adieu au monde et à la vie ? Ou de quelqu’un pour qui l’éternité s’approche de manière languissante ? C’est cette question qui a motivé Grace Ellen Barkey et Lot Lemm, de la troupe belge Needcompany.

Dans ‘FOREVER’, Mahler est à peine reconnaissable, même si dans son essence, il est présent partout et à tout moment. Le chanteur Maarten Seghers s’approprie avec génie le corpus de lieder qui, sans l’accompagnement instrumental, résonne de manière abstraite, voire absurde. Mais c’est précisément cela qui souligne l’égarement de l’individu face à la mort.

Des petites feuilles en porcelaine, suspendues un peu partout sur la scène comme un paysage arboré sculptural, font un instrument d’accompagnement saisissant. Lorsqu’ils sont mis en mouvement par des ventilateurs, ils se mettent à tinter. La tendresse et la fragilité de la vie retentissent à chaque souffle de vent et s’élèvent lentement jusqu’à ce que le tout se fracasse par terre, comme des feuilles givrées dans une tempête d’automne.

Les danseurs et danseuses en mouvement constant – tantôt en oiseaux piaillants, tantôt en nymphes séductrices – dans le cycle éternel de la nature constituent un contrepoint tourbillonnant. Pourtant, ils finissent par devenir d’une certaine façon – et malgré leur virtuosité impressionnante et leur irréprochabilité drapée de ridicules dessous hyperféminins – un ballast inutile dans ce spectacle. Ou alors la véritable beauté de la vie réside-t-elle justement dans le fait de reconnaître la beauté supérieure de la mort – tout en restant capable de continuer à vivre ?