Une histoire de deux femmes et de quelques hommes insignifiants

L’œuvre de Jan Lauwers, aussi bien celle de l’écrivain que celle de l’homme de théâtre, se caractérise par des rôles féminins puissants. Une femme qui le subjugue depuis longtemps est l’artiste états-unienne Lee Miller. Photographe (de guerre) et journaliste, mannequin ayant fait la une de multiples magazines et alcoolique. Une femme abusée, maltraitée, vilipendée, adulée et rejetée. Et puis il y a cette photo : 'Lee Miller in Hitlers Bathtub' par David E. Scherman en 1945. Le texte commence au moment où elle se tient devant la baignoire de Hitler, dans ses vêtements malodorants, encore imprégnés des odeurs de cadavre de Dachau.
 

Jan Lauwers: 'Le livret 'Lee Miller dansla baignoire de Hitler' n’est pas le récit fidèle de la vie de Lee de sa naissance à sa mort. Ce qui fascine l’écrivain en moi, c’est l’ambiguïté morale de Lee : une femme dans une société patriarcale où le pouvoir s’exerce de manière impitoyable. Que signifie d’ailleurs pour Lee le fait de prendre un bain dans la baignoire d’un monstre ? Que signifie en outre pour elle le fait d’y être photographiée ? Que signifient pour elle la photographie et la vérité quand elle déplace des cadavres à Dachau pour obtenir une meilleure lumière?'

Parce qu’avant tout, Jan Lauwers ne voulait pas écrire de biographie. Je n’ai pas étudié en profondeur la vie de Lee. Le livret est le portrait d’une femme, qui, à la fin de sa vie, a dit qu’elle se considérait comme une vache à lait entièrement siphonnée, vidée. Une femme ayant vécu dans l’ombre de tant d’hommes – des hommes célèbres, parfois tristement célèbres. "J’ai voulu dresser un portrait non pas de Lee en particulier, mais de tant de femmes muselées, que l’histoire de l’art a effacées." - Jan Lauwers

« Pour être artiste, une femme devait être un monstre. Et celle qui épousait un autre artiste était marquée – comme une vache. » - Lee Miller